mardi 8 septembre 2015

Approche exopopolitique du 19 octobre 2015. De la prédation.

Comme ça, de bon matin, se mêler de politique comme d'une chose à laquelle on n'entend à peu près rien, c'est plus ou moins l'horreur.

La question se pose donc de savoir ce qui reste à dire lorsque le flair se substitue à l'analyse.  Je ne sais pas si c'est un effet de mes récentes lectures (les livres de Quignard), mais quand je passe en revue les candidats et que je considère froidement la gueule qui se tient derrière le discours, j'en arrive assez vite à la conclusion que la politique est affaire de prédation, et que toute question relative au vote que nous allons collectivement chier le 19 octobre prochain se rapporte, en fin de compte, à la question de savoir par qui et de quelle façon nous préférons nous faire dévorer.

Si je me laissais aller à quelques variations rimbaldiennes de type «cette famille est une nichée de chiens»,  je dirais que Harper est un reptile (crocodile tapi dans un étang de glaire froide), Trudeau un charognard ahuri (le cadavre du père est méconnaissable), Mulcair un diable de Tasmanie en rémission de rage, et Duceppe un renard argenté qui a pris une volée de plomb dans le derrière.

La prudence commanderait l'installation de trappes aux quatre coins de la citoyenneté, et une saine abstention.  Mais comment ne pas voter?

C'est pourtant simple: on n'a qu'à demeurer chez soi le 19 octobre prochain, regarder en rafale 6 ou 7 épisodes de American Horror Story (je conviens que ce n'est pas le choix le plus cohérent, mais bon), et laisser à notre prochain le soin de désigner les contours de la mâchoire qui claquera sur notre viande.

--  Lâche!  Nihiliste!  Cynique désabusé!

À voir.  Puisque nous avons depuis longtemps préféré la lente dévoration de nos cellules à l'éclat pur et dur de la révolution qui ne sert à rien (sinon à nous rappeler qu'être humain passe parfois par la décision de ruer dans les crocs du prédateur qui nous talonne), il faudra bien se rentrer dans la tête ceci: dans tous les cas, nous sommes cuits dans l'exacte mesure où on nous mange cru.

Le contrat social est un pacte de prédation au terme duquel nous apprécions à distance le goût de notre viande vive dès qu'elle se met à rouler dans la gueule du pouvoir.

Le 19 octobre prochain, je ne voterai pas. (Sinon, pour Jacynthe.) 

Le 19 octobre prochain, je souhaiterais que personne n'aille voter.  Je souhaiterais que pour une fois, les prédateurs se retrouvent à claquer dans le vide tout au bout de leur chaîne, qu'ils se dévorent entre eux ou qu'ils crèvent de faim.

Et nous, alors?  Ben, on sortira les tables dans la rue, on allongera les roses, les plats et les bouteilles, on se fera un vrai festin communautaire, un méga party de végétarisme économique.  Prédation zéro.

On décidera collectivement de reporter la date des élections au 24 décembre.  Un Grand Référendum de Noël dont la question sera:  Hééé, est-ce qu'il reste encore de la pizza?

Et la réponse sera oui.